Faites connaissance avec l’atelier « connaître les plantes sauvages comestibles dans leur environnement » !
Depuis 4 ans, l’association Cueille et Croque propose annuellement une série de 8 ateliers sur le thème « connaître les plantes sauvages comestibles de son environnement », dans le cadre du plan d’éducation au développement durable de la Métropole de Lyon. Ces ateliers sont prioritairement à destination des acteurs de l’éducation populaire : jardins partagés, centres sociaux, membres d’associations, enseignants etc mais aussi accessibles à tout un chacun …
Découvrez la première sortie organisée cette année au travers du récit de l’une des participantes …
On est venus à vélo, en Tram ou en voiture, des quatre coins du Territoire du Grand Lyon. Seuls ou deux par deux, un peu en avance, ponctuels ou bien carrément en retard, nous finissons par nous retrouver, 17 apprentis-cueilleurs, réunis autour de Frédérique, notre guide et formatrice durant les 7 sorties au programme.
Notre premier rendez-vous a lieu au Parc de la Feyssine à Villeurbanne, en bordure du Rhône. C’est un parc de 40 hectares « élevé en liberté » et « que la nature s’est appropriée » comme le décrit la carte nature du Grand Lyon distribuée dès notre arrivée. C’est là que nous allons faire connaissance avec ces si précieuses plantes sauvages, souvent considérées à tort comme de vulgaires mauvaises herbes.
Mais tout d’abord il est temps de faire connaissance avec chacun des participants rassemblés autour de Frédérique (association cueille et croque): Delphine, Alexandra, Nathalie, Christelle, Thomas, Jérôme, Joëlle, Valérie, Audrey, Marie-Annick, Céline, Aude, Valérie, Claire, Céline, Silvane et Marie.
Les présentations faites, Frédérique me confie le rôle de «journaliste»… Panique à bord ! Puis je respire un bon coup et redescends sur terre. On ne me demande pas d’endosser la veste du «grand-reporter», simplement d’être la «petite-rapporteuse» de cette aventure. Il me suffira pour cela de noter sur mon carnet ce que nous dira Frédérique. Et pour ce qui est des lacunes, les oublis, les «trous», je pourrais toujours consulter le «Dieu Internet», puis je soumettrai mon travail à Frédérique pour correction…
Le cours peut commencer.
Tout d’abord une touche personnelle :
Pourquoi ce désir de redevenir sinon un chasseur-cueilleur, un simple cueilleur… un cueilleur de simples ?
Rassurez-vous, je ne suis pas une adepte de « la secte de ceux qui annoncent l’effondrement proche de notre civilisation » ; je ne cherche pas non plus à m’initier à des techniques de survie suite aux pénuries annoncées de pétrole, d’eau ou de nourriture ; et loin de moi l’idée d’aller vivre dans les bois, chasser le cerf ou le sanglier, puis de tanner leurs peaux pour en recouvrir mon corps…
Il s’agit plus simplement d’un désir fort de retrouver ce lien que j’ai pu avoir, enfant, avec la nature ; retrouver la joie enfantine de faire l’école buissonnière, de préférer, l’espace d’un après-midi, l’école de Dame Nature. Je me souviens du bonheur d’aller par les chemins de traverse, par les champs ; de cueillir, sentir et mâchouiller une fleur d’acacia, de sentir sur ses papilles son goût de miel et de petit pois ; de glaner et mordiller des baies d’aubépine…
Désir aussi, pourquoi pas, de tenter de « percer le mystère » ; connaître les « secrets des plantes » ; apprendre leur nom et leurs vertus, c’est jouer à l’apprentie-sorcière, car chaque herbe, chaque bourgeon, chaque fleur porte en elle une part de magie ; savoir que ces plantes que l’on foule aux pieds en toute inconscience peuvent receler des trésors de bienfaits, c’est comme lever un coin du voile qui cache le secret des dieux…
Et pour finir, consciente de l’appauvrissement de notre alimentation, j’espère, en devenant cueilleuse à mon tour, connaître les « bonnes herbes » qui se mangent afin d’en retirer les nutriments essentiels qui manquent tant à nos aliments produits par le biais de l’agriculture moderne.
Et maintenant place à la cueillette buissonnière !
Le cours commence avec un bref aperçu sur les origines de l’agriculture et son rapport avec les plantes sauvages :
Pendant 3 millions d’années notre espèce s’est nourrie de cueillette et de chasse. On se déplaçait au gré des saisons ou des déplacements des troupeaux.
Puis Homo Sapiens, toujours en quête de nourriture, s’arrête un jour de courir, la fin de la dernière glaciation lui apportant abondance de gibier et de végétaux et, on ne sait pour quelle raison, se met à cultiver les céréales ou des tubercules selon où il se trouve.
Il y a environ 10 000 ans, ce fut la révolution agricole, dite révolution néolithique, dans le croissant fertile. L’agriculture a surgi indépendamment plus ou moins au même moment, à quelques milliers d’années près, dans d’autres parties du globe (Amérique, Asie). Depuis, alors que sa nourriture était jusque-là constituée d’un large éventail de vivres qui leur apportait toutes les vitamines, protéines, lipides et minéraux nécessaires (fruits, noix, graines, feuilles, tiges, racines, tubercules, insectes, pêche, animaux… ), l’homme va considérablement appauvrir la diversité de son alimentation et ses apports en nutriments pour les réduire à quelques denrées cultivées : céréales et légumineuses dans un premier temps, puis au fil des millénaires, fruits et légumes vont venir s’ajouter à ces cultures de base. La poignée d’animaux domestiqués : moutons, chèvres, vaches, porcs viennent également de cette région du Proche Orient, la poule venant d’Asie du sud est. Seul le lapin est d’origine Européenne.
On a pensé que la révolution agricole a été un grand bond en avant pour l’humanité. Mais on peut se demander en quoi une vie de cultivateur est plus facile qu’une vie de chasseur-cueilleur. Le corps d’Homo Sapiens, fait pour courir après le gibier et grimper aux arbres s’est retrouvé courbé en deux de l’aube au crépuscule, pour creuser la terre, enlever les cailloux, désherber, nourrir la terre, irriguer, planter, faucher, protéger, transformer les céréales…
À tel point que certains pensent que «ce n’est pas nous qui avons domestiqué le blé, c’est lui qui nous a domestiqués. Le mot «domestiquer» vient du latin domus «maison». Or, qui loge dans une maison ? Pas le blé, le Sapiens» (Sapiens – Une brève histoire de l’humanité – Yuval Noah Harari)
Puis Frédérique nous parle de cet homme préhistorique retrouvé en Italie, près de la frontière Autrichienne, dans l’estomac duquel on aurait identifié 27 sortes différentes de végétaux !
Il semblerait que nos ancêtres «consommaient de 3 à 10 fois plus de vitamines que l’homme moderne» (www.hominides.com alimentation, préhistoire, nutrition)
Ce qu’il faut savoir avant de faire ses emplettes du côté de Dame Nature :
Quand on s’intéresse aux plantes sauvages comestibles, il convient tout d’abord de savoir identifier les plantes toxiques (les herbes de sorcières !).
En France, les plantes toxiques sont assez rares (environ 4%) et encore plus rares sont celles qui peuvent provoquer la mort à faible dose (1, 25 %).
Mais il est essentiel de les connaître, car certaines peuvent provoquer la mort et d’autres nous rendre très malades.
– L’Aconit Napel, extrêmement dangereuse rien qu’au toucher,
– Le Muguet (que l’on peut facilement confondre avec l’ail des ours dans les sous-bois),
– Le Colchique ….
Mais certaines plantes comestibles peuvent aussi présenter des parties toxiques, par exemple, les feuilles de la rhubarbe peuvent être mortelles, les feuilles de pommes de terre ou de tomates le sont également. La toxicité dépend également du lieu où pousse la plante (pollution), de son âge et même de la saison.
Voici les premières règles d’or du cueilleur :
« Seulement les plantes dont tu es sûr à 100%, tu ramasseras »
«Connaît bien tes toxiques et en sécurité tu ramasseras»
Il ne faut pas négliger non plus le risque de transmission de certaines maladies par les parasites :
– L’échinococcose, engendrée par un ver dont les larves peuvent être présentes dans les déjections de chiens, de chats ou de renards,
– La douve du foie que l’on peut attraper suite à la consommation de plantes vivant en milieux humides ou au bord des cours d’eau.
Quelles sont les parties comestibles de la plante ?
Sur certaines plantes, tout est bon. Les racines et les autres parties souterraines (les tubercules, les rhizomes et les bulbes), les jeunes pousses, les tiges, les feuilles (Mais attention lors de la cueillette a laisser une chance à la plante d’achever son cycle et se reproduire : ne cueillir que quelques feuilles, car la plante en a besoin pour la photosynthèse et meurt si on les lui prélève toutes, la fleur (attention : la plante en a besoin pour sa reproduction…), les graines, les fruits et même l’aubier, fine partie sous l’écorce). Néanmoins, sur d’autres plantes, on ne peut consommer que certaines parties… tout n’est pas consommable. Alors prudence !
Une autre règle d’Or en matière de cueillette :
– « Dame Nature tu respecteras. Seulement ce dont tu as besoin pour ton usage personnel tu cueilleras ».
Ces trésors pour la santé
Frédérique nous précède au bord du fleuve et nous invite à goûter les bourgeons et jeunes feuilles d’érable champêtre. C’est frais, c’est fort ! Un goût de sève, d’herbe un peu amère. Le bourgeon d’érable champêtre soulage les troubles digestifs, tels que nausées, vomissements.
Tout en devisant, nous continuons notre descente le long du Rhône et nous faisons une halte autour d’un arbuste que Frédérique identifie comme un peuplier noir. Nous goûtons ses bourgeons, poisseux avec un goût prononcé de Propolis. En effet, elle est récoltée sur cet arbre par les abeilles pour colmater la ruche en l’associant avec leur salive et de la cire… La Propolis a des propriétés anti-microbiennes bien connues.
Les conversations vont bon train tandis que nos pas nous ramènent dans la prairie couverte de petites fleurs blanches, bleues et jaunes en ce début de printemps pluvieux.
Nous apprenons à reconnaître le plantain, appelé « Pied de l’homme blanc » par les amérindiens, car ils avaient remarqué qu’il poussait là où les européens foulaient le sol. Il fut effectivement introduit en Amérique par les « blancs ». Il en existe 3 espèces principales le lancéolé, le majeur et le moyen. Il est très efficace contre les piqûres d’insectes et d’orties, les éraflures, les ampoules… il apaise instantanément la douleur. On peut le manger cru ou cuit ; cru, il possède un goût de champignon.
Frédérique nous parle ensuite de la mauve. C’est une plante mucilagineuse, le mucilage étant une substance végétale qui a une consistance visqueuse, gélatineuse. Il a la propriété de soulager les irritations des muqueuses en formant un film protecteur.
« Le mucilage, c’est glissant » lance une participante. Il est encore trop tôt dans la saison pour que nous puissions apprécier ses si jolies fleurs d’un rose violacé veiné de violet. Nous nous contentons de cueillir quelques feuilles presque rondes pour les coucher dans nos herbiers. Les feuilles se consomment ou cuites. J’ai lu quelque part que la mauve fut un des légumes les plus prisés de l’Antiquité.
Nous observons ensuite le bouillon blanc, ou molène, de texture mucilagineuse comme la mauve, et dont les fleurs et les feuilles sont utilisées contre les affections pulmonaires ou cutanées et les inflammations de la gorge ;
Pas la peine d’aller bien loin… Il nous suffit de fixer le sol. À chacun de nos pas Frédérique nous signale un trésor que, pauvres ignorants que nous sommes, nous piétinons en toute inconscience.
Ici, la fragile et gracieuse bourse à pasteur, ou capselle, est quant à elle une brassicacée anciennement appelée crucifère (de la même famille que les choux). La forme en cœur du fruit a inspiré aux anciens une médication digne de la théorie des signatures : pour soigner un chagrin d’amour, essayez une potion à base de bourse à pasteur. Faire infuser pendant 20 minutes une petite poignée de fruits frais pour 1/2 litre d’eau. À boire dans la journée… Avant la floraison, sa rosette peut être confondue avec celle du pissenlit mais il suffit, pour les différencier, de savoir que les pointes du pissenlit regardent vers le bas, alors que celles de la capselle pointent vers le haut ! On consomme les rosettes de jeunes feuilles tendres en salade, seule ou en mélange avec d’autres.
Un peu plus loin, sous un bosquet d’arbustes buissonnants, un tapis de verdure que les néophytes que nous sommes pourrions confondre avec des orties s’il n’était pas piqueté de mignonnes fleurettes allant du rose au parme. Il s’agit du lamier pourpre. C’est une lamiacée (tige carrée, feuilles opposées et décussées, avec des fleurs en forme de lèvres -c’est la raison pour laquelle on appelait autrefois cette famille les Labiées- et dont l’ovaire est divisé en 4. C’est un légume sauvage des plus apprécié car réellement savoureux et facile à cuisiner. On peut aussi faire un pestou avec les fleurs, les feuilles, de l’huile de noix et des noix.
Nous ne sommes pas au bout de nos surprises et nous apprenons que, ce que par naïveté j’ai défini plus haut comme un bosquet buissonnant, s’avère être des buissons d’aubépine.
L’aubépine, famille des rosacée, est l’arbre des fées pour les irlandais, symbole de pureté et de protection. C’est un cardio-régulateur qui tonifie et calme le cœur. On récolte les sommités fleuries par petits bouquets avec leurs jeunes feuilles au printemps et les fruits se récoltent en automne.
Dans notre dos, le fleuve tout proche gronde emportant dans son tumulte d’énormes branches de bois flotté. Sur l’autre rive, une langue de terre offre une escale accueillante à des dizaines de cormorans, parfaitement immobiles, comme pétrifiés, offrant au soleil leurs ailes déployées.
J’ai du mal à reconnaître les tendres rosettes vert pistache que Frédérique identifie pour nous comme la bardane. C’est pourtant avec ses fruits que, enfant, on bombardait les copains : ces fameux « scratchs » qui s’accrochent partout, sur les vêtements, les cheveux, si difficiles à enlever ! On comprend qu’un ingénieux ingénieur ait un jour eu l’idée d’imiter la multitude de crochets de ce fruit en inventant… le Velcro !
De la famille des astéracées, c’est une bisannuelle. Dépurative, on l’utilise également en dermatologie. On en consomme la racine qui a un goût d’artichaut, mais aussi sa haute tige lorsqu‘elle est encore tendre.
Dans le ciel gris perle, les nuages pareils à de facétieux moutons blancs semblent jouer à 1, 2, 3 soleil… Et, suivant le rythme de ce cache-cache entre soleil et nuages, j’improvise un étrange ballet qui consiste à ôter mon blouson quelques minutes à peine après l’avoir enfilé.
À l’ombre des grands arbres, Frédérique nous fait découvrir ensuite la ficaire. C’est une plante assez remarquable. C’est une renonculacée, donc de la famille des renoncules qui sont toutes toxiques, sauf la ficaire quand elle est très jeune, avant l’apparition de la fleur ! Et, toujours en vertu de la fameuse théorie des signatures, on lui donne également le nom d’ »herbe aux hémorroïdes » ; l’extrémité de ses racines est en effet comparable à de petits tubercules ovoïdes…
C’est là aussi que nous trouvons tout un parterre d’ail des ours. Il pousse dans les endroits ombragés et humides. On raconte que les ours en sortant d’hibernation faisaient une consommation importante de cet ail. Feuilles, fleurs, boutons floraux et bulbe, toutes les parties de la plante se consomment, crues, en salade ou en pesto. On peut même la cuire comme les épinards, mais alors il perd son goût d’ail, ou bien la rajouter aux plats cuisinés. Attention : avant la floraison, l’ail des ours peut être confondu avec le muguet ou le colchique qui sont toxiques ! Mais les feuilles de l’ail des ours sont plus molles que celles du muguet et le colchique a son bouton floral à la base de ses feuilles.
Nous arrivons maintenant sur un espace couvert de fleurs jaunes. C’est la primevère officinale, le joli coucou de nos prairies. Feuilles et fleurs peuvent être consommées crues ou cuites. Crues, elles ont un goût légèrement anisé et un peu piquant. Les fleurs sont consommées en salade et décorent joliment les plats chauds ou froids.
C’est une journée bien remplie qui s’achève. On se sépare, notre cahier de notes bien rempli de tous nos précieux acquis, mais aussi des feuilles et des fleurs que
nous allons faire sécher dans notre herbier de plantes sauvages et comestibles.
On se retrouve le 5 mai à Vernaison. Merci Frédérique !
ça donne envie ! Participé aux ateliers l’année dernière, superbe article !